Jusqu’au 14 novembre prochain, le Musée d'art et d'industrie de Saint-Étienne organise l’exposition Les rubans de l’intime qui présente un trop peu connu savoir-faire artisanal et séculaire de la ville. Si on découvre avec ravissement les rubans sublimant la lingerie fine des plus grands créateurs, les commissaires Sylvain Besson et Sylvain Bois rappellent que ces fins rubans jouent le même rôle de distinction pour les textiles de l’habitat et, par extension, pour les hôtels prestigieux. Le luxe aussi se cache dans les détails…
Archi-Cultures : L’exposition Les rubans de l’intime met en valeur un savoir-faire trop méconnu de l’artisanat haut de gamme et traditionnel de Saint-Étienne. Lequel ? Quels sont ses domaines d’application ?
Sylvain Besson, chargé des collections textiles : « L’exposition temporaire Les rubans de l’intime met en valeur les rubans fabriqués pour le secteur de la lingerie corseterie et les textiles de santé encore peu connu du grand public aujourd’hui. C’est un savoir-faire technique traditionnel et moderne qui a su se diversifier et innover pour satisfaire la demande des fabricants ou des créateurs de sous-vêtements, notamment avec l’introduction et l’adaptation des fibres synthétiques et élastiques pour gainer ou maintenir le corps. Ce savoir-faire est apprécié par de nombreux créateurs de mode que ce soit Chantal Thomass ou la maison Chanel par exemple.
Sylvain Bois, responsable unité scientifique et des collections des musées de Saint-Etienne : Par ailleurs, les domaines d’application du rubans sont nombreux. Dans l’habitat, la passementerie met en valeur la décoration d’intérieur. Rubans, pompon, franges, torsades, galons ornent les meubles, les rideaux, les miroirs, les tentures, les luminaires, les canapés ou les fauteuils, dans un style traditionnel ou contemporain. Ces types de rubans et savoir-faire sont montrés dans les salles permanentes et témoignent de la diversité des productions textiles de la région stéphanoise.
Archi-Cultures : Quelle valeur ajoutée apportent les rubans de faible largeur à chacun de ces domaines des destination ?
Sylvain Bois : Le ruban apporte souvent une plus-value technique et esthétique dans différents domaines d’application. Dans la lingerie ou la haute couture, il permet de singulariser les collections proposées chaque année par les créateurs, ce qui est fondamental dans une économie ou tout tend à se standardiser. En décoration d’intérieur, les embrasses, pompons et autres galons apportent une touche finale et personnelle aux salons. La recherche continue au niveau de la création permet de proposer des collections qui s’adaptent au style très moderne. Le maintien du savoir-faire traditionnel permet également de proposer des collections qui s’adapteront parfaitement aux hôtels ou aux demeures qui ont un style plutôt classique.
Archi-Cultures : À travers une scénographie intimiste, le parcours de l’exposition présente des pièces de célèbres maisons grâce à de nombreux prêts: guêpières de Chantal Thomass - marraine de l’exposition -, robe corsetée de Jean-Paul Gaultier, soutien-gorge Cadolle, Lise Charmel, lingerie Dior, déshabillé Franck Sorbier etc. Le haut de gamme, voire le luxe, restent-ils selon vous les domaines emblématiques de la création et les meilleurs vecteurs pour affirmer la personnalité d’une marque et donc lui donner les meilleures chances de réussite commerciale dans notre économie globalisée et uniformisée ?
Sylvain Bois : Le luxe et la création sont en effet un moyen de singulariser une marque dans une économie globalisée. Les marques de luxes l’ont bien compris qui font appellent aux entreprises rubanières encore en activité.
Sylvain Besson : Que ce soit dans l’emballage, le packaging, la parfumerie, la décoration, la mode ou la lingerie, le ruban est un élément combinant une fonction technique et ornemental constituant ou soulignant la qualité d’une pièce. Les fabricants stéphanois collaborent avec les grandes marques du luxe sur le plan de la créativité et l’innovation, maintenant ainsi un savoir-faire d’excellence. »
Propos recueillis par N.A
Légendes visuels :
Tout en haut à droite :
Couverture du catalogue de l’exposition
Dans le texte ci-dessus à gauche :
Corset, marque « Lafayette – modèle Espécé », vers 1920, tissu broché floral jaune pâle et jaune d’or orné d’un ruban de satin jaune repiqué de 2 rubans sur le haut et 4 jarretelles en satin jaune. Collection Nuits de Satin, © Nuits de Satin
Dans le texte ci-dessus à droite :
Guépière "Coup de foudre" avec dentelles et jeux de tresses, Chantal Thomass, Paris, vers 2019, © Hubert Genouilhac
Ci-dessous en galerie :
Vue du personnel de l’usine Villard-Doron par Georges Martinier, Saint-Étienne, vers 1950-1960, Musée d’Art et d’Industrie de Saint-Étienne,
Soutien-gorge, Herminie Cadolle, Paris, 1901, Collection NuitsdeSatin.com, © Nuits de Satin
Galerie photos
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