Le retour du « quart d'heure de gloire » en déco

Actualités - 05 mai 2017

Le retour du « quart d’heure de gloire » en déco

Connu surtout pour son impact sur les arts plastiques dans les Sixties, le Pop Art théorisé par Andy Warhol a rapidement imprégné le design et la décoration. Aujourd’hui, il revient en réveillant les intérieurs, par touches ou par associations d’objets… parfois (ou par essence) iconoclastes !

 

Le « Pop Art » semble retrouver une place de choix dans les intérieurs actuels. Né en Grande-Bretagne au milieu des années 50 sous l’impulsion de Richard Hamilton, ce mouvement s’est rapidement répandu outre-Atlantique avec pour célèbres chefs de file Andy Warhol (artiste, producteur du culte groupe rock Velvet Undeground et auteur de la fameuse prophétie selon laquelle chacun aurait son quart d’heure de gloire) Roy Lichtenstein, inspiré de la publicité et inspirateur de comics, ou encore Jasper Johns et ses fameuses interprétations du drapeau américain. Le Pop Art – « art pop(ulaire) » - porte bien son nom. Et pour cause, il est né en réaction aux arts trop élitistes, abstraits et prétentieux. Tout l’art de ce mouvement réside justement dans le détournement des références visuelles du quotidien et dans la réappropriation des thèmes de la culture et de la consommation de masse.

 

Un come-back réussi à l’ère où la personnalisation de l’intérieur

« Populaire, provisoire, jetable, bon marché, produit en série, jeune, drôle, sexy, astucieux, spectaculaire et très rentable », telle est la définition complète du « Pop Art », selon Richard Hamilton. A quelques adjectifs près, cette description pourrait correspondre au mobilier de série proposé aujourd’hui dans les grandes enseignes d’ameublement.

Kitsch pour les uns, audacieux pour les autres, les objets « Pop Art » sont décomplexés. Ils transcendent le banal et détournent le quotidien, comme les images véhiculées par les médias de masse. Quoi de mieux donc pour revivre les heures du « Pop Art » que notre époque, qui porte tous les symptômes d’une ère surmédiatisée – et même sur-connectée – et d’une consommation effrénée donnant le vertige en pensant à la clairvoyance de Jean Baudrillard dans son livre de 1970 ?  Plus de 50 ans après la naissance de cette mouvance, on en retrouve ainsi des manifestations dans les catalogues de déco et chez les éditeurs de mobilier design. A la façon des onomatopées de Brigitte Bardot dans la chanson « Comic Strip » de Gainsbourg en 1967, cette tendance fait « Pop ! » en distillant sur les murs un esprit BD, « Crac ! » en structurant l’espace de mobilier aux lignes originales et « Boum ! » en faisant exploser la couleur là où on ne l’attend pas toujours ! A l’ère où la personnalisation de l’intérieur est une quête du consommateur, la tendance « Pop Art » fait donc un come-back réussi… et tranche avec les intérieurs épurés, parfois même aseptisés. Les éditeurs de mobilier, les sites de vente en ligne et même certaines grandes enseignes l’ont bien compris et participent à insuffler (de nouveau) ce vent arty dans la décoration d’intérieur.


Défilé d’imprimés, de couleurs flashy et de géométries variables…

Mais qu’est-ce qu’une déco « Pop Art » ? C’est oser les couleurs acidulées, les formes rondes ou ovoïdes, mais aussi les imprimés audacieux et les géométries décalées. Le papier peint, qui fait lui aussi son grand retour, participe à cette tendance. Il s’affiche avec des styles graphiques, des motifs imposants ou encore des imprimés façon bulle de BD qui ne sont pas sans rappeler les œuvres de Roy Lichtenstein déjà cité. D’autres motifs, comme les lèvres rouges, ultra-féminines, sont devenus des symboles du Pop Art. On les retrouve sur du papier peint, des stickers décoratifs, des tableaux ou encore des coussins. Et pour ceux qui voient grand, il existe des objets version XXL, comme le canapé « Bocca » créé par le Studio65 pour la marque italienne Gufram. Les couleurs primaires traduisent aussi le style « Pop Art » : le rouge mais également, le jaune et le bleu. Ces coloris réinvestissent les intérieurs. L’esprit « Pop Art » c’est donc aussi laisser entrer une esthétique ludique. Ainsi, le styliste Philip Colbert a imaginé pour Made.com un fauteuil requin, baptisé Rodnik… D’aucuns y verront sans doute une subtile référence aux Dents de la Mer…en bien moins terrifiant !


Mélange de matières (d)éton(n)antes !

Mais le retour du « Pop Art » dans la déco, c’est aussi assumer le mélange des matières. Et pas n’importe lesquelles. Le similicuir ou le vinyle sont en tête. Ce dernier est d’ailleurs particulièrement développé dans l’habitat actuel : sur les sols ou les murs, il offre une grande palette de possibilités… des plus classiques aux plus surprenantes ! En fait, les matières industrielles retrouvent leurs lettres de noblesse. Le style industriel, très en vogue, le prouve d’ailleurs assez. Visuels, les objets « Pop Art » qui investissent la décoration sont finalement indémodables, car ils reposent sur l’essence même du mouvement artistique ancré dans l’époque de son épanouissement ou de sa résurrection. Or, en 2017, difficile de renier celle-ci ! A la fois rétro et vintage, les objets « Pop Art » osent être prosaïques, à l’instar du fauteuil Rubicube de Jean-Charles de Castelbajac, évocation des tableaux géométriques de Mondrian.      


Pour qui cultive le sens du clin d’œil et de l’ironie, ce retour de flamme créative et débridée dans les intérieurs est bienvenu. Arty pour certains, kitsch pour d’autres, ce style ne laisse en tout cas pas indifférent. Et, pour parer aux éventuelles critiques, le propriétaire anticonformiste d’un canapé-bouche ou d’un tapis ultra-bariolé pourra toujours citer l’illustre écrivain Umberto Eco, qui a dit : « Dans le Pop Art, le kitsch est racheté et élevé à un nouvel état de dignité esthétique ».

 

Vanessa Barbier & Jérôme Alberola

 

 

Partager cet article

Le retour du « quart d'heure de gloire » en déco
Le retour du « quart d'heure de gloire » en déco

Liens sur vignettes ci-dessous