Bienvenue dans le miroir et la pensée

Actualités - 08 janv. 2016

Bienvenue dans le miroir et la pensée  

L’agencement est la grande tendance de fond, de forme et d’avenir de l’habitat. Ce site en sera le média de réflexion, en étant à la fois son miroir et son vecteur d’idées. Le vôtre aussi, pour porter un autre regard.    

 

Curieux cheminement que celui emprunté par l’agencement. A l’origine, il y a quelques décennies, ce secteur d’activité était délimité et défini, consistant à équiper et décorer les magasins et autres show-rooms de manière rationnelle et harmonieuse afin d’assurer aux chalands un plaisir (des yeux) et un confort (des déambulations) favorables à la vente des produits exposés. Le développement des enseignes nationales sous concession ou franchise, dans de nombreux secteurs d’activité, a généré une charte de présentation extérieure et intérieure devant créer une identité commune à tout le réseau, reconnaissable par les consommateurs de Dunkerque à Menton et de Bayonne à Strasbourg. L’agencement s’est alors complexifié en se théorisant, répondant à de savants calculs des flux dans les surfaces de vente, et à de récurrentes études sociologiques sur les modus operandi, les goûts chromatiques et les réflexes sensoriels des consommateurs. Des agences spécialisées se sont créées dans les années 1980, répondant à l’appel d’air de cette nouvelle appréhension des commerces. Restaurants, stations-services, boutiques de vêtements, rayons des grands magasins ont ainsi fait peau neuve avec une cosmétique révélant l’esprit et la vocation de l’enseigne, mais aussi masquant parfois avec talent la faiblesse de son offre.

 

Curieux cheminement que celui emprunté par l’agencement, car il s’est ensuite dirigé vers l’habitat domestique, en perdant ses limites précises d’intervention et la définition circonscrite de ces acteurs par un phénomène de convergence. Disons, pour résumer à grands traits que les premiers à revendiquer le terme d’agenceurs pour le grand public ont été les professionnels du dressing  (ou rangement), qu’il s’’agisse de magasins indépendants ou sous enseigne. Après s’être spécialisés dans l’équipement de la pièce dédiée à cet usage (de l’ex-cagibi des anciennes demeures au nouvel espace dressing dans les suites parentales des maisons récentes), ils  ont progressivement investi les autres volumes de l’habitat (salon, chambre, entrée) pour les optimiser via des bibliothèques, étagères, panneaux de crédences, d’ornement ou de cloison, tous réalisés  sur mesure. Sur mesure ne prend pas de trait d’union (contrairement à ce qu’on lit trop souvent sur les dépliants et vitrines), mais cette expression, lorsqu’elle s’applique, permet de faire le lien avec les cuisinistes qui, par essence, ont toujours eu pour vocation de proposer des ensembles personnalisés aux dimensions, configurations, matières et couleurs répondant aux moyens, besoins et désirs (équation ardue) de chaque client. Les cuisinistes et nombre de leurs fabricants se sont d’abord diversifiés dans la salle de bains dans les années 1990, avec un succès condamné à être au mieux limité, au pire absent, pour cause de divergence d’esprit (le feu et la convivialité dans la cuisine, l’eau et l’intimité dans la salle de bains) et de contraintes (l’univers du bain est plus technique et varié en corps de métier). Aussi, au cours de la décennie suivante, se sont-ils orientés vers un métier plus proche de leurs compétences : le dressing, en s’étendant ensuite, eux aussi, à d’autres pièces domestiques, la cuisine s’ouvrant généreusement au salon par des ensembles mixtes à faces dédiées, le salon répondant à l’invitation en pénétrant dans la cuisine avec des façades de même esthétique. Dans le même temps, nombre de magasins de dressing se sont lancés dans la vente et l’installation de cuisines intégrées. Comme les cuisinistes, leur diversification est motivée par une volonté de croissance externe pour créer de la valeur ajoutée, légitime en termes de compétences, comme en termes économiques alors que la crise sévit toujours.        

 

Le secteur de l’agencement moderne est donc le fruit d’un phénomène de convergence. Celle-ci s’exerce aussi verticalement. Comment oublier, en effet, les architectes d’intérieur qui, pendant longtemps, étaient les seuls à couvrir l’ensemble de l’habitat, mais dont le positionnement haut de gamme les plaçait hors de portée numéraire du commun des consommateurs ? Ainsi ne représentaient-ils au sein de ce secteur qu’une marge ayant tendance à se réduire encore avec l’arrivée des autres acteurs déjà cités, et dans laquelle certains se replient comme par réflexe identitaire, jaloux de leurs hautes compétences de conseil, alors que d’autres « archis » tentent au contraire l’ouverture en pratiquant des tarifs adaptés à une plus large clientèle. Comment oublier également les artisans de l’aménagement de la maison et des CHR, regroupés souvent sous l'appellation de menuiseries dites industrielles, tellement nombreux et divers en France qu’ils sont impossibles à recenser ? Leur poids cumulé et celui de leurs actions ponctuelles en font des acteurs incontournables, du menuisier qui réalise la cuisine de son client chez qui il a déjà bâti l’escalier, à l’ébéniste qui pose un dressing pour compléter une enfilade en chêne massif.

 

Tous ces profils de professionnels peuvent revendiquer le terme d’agenceurs de l’habitat. S’y ajoutent les magasins de mobilier haut de gamme implantés dans les beaux quartiers et qui, outre des canapés et commodes, proposent de « l’aménagement » de l’habitat, incluant des cuisines haut de gamme et des dressings sur mesure. Cette dernière vocation et les notions associées de savoir-faire sur chantiers, de conseils pertinents et de valeur ajoutée, constituent à la fois leur problématique commune et le vecteur de distinction, devenue indispensable pour se distinguer face à la grande distribution qui investit elle aussi, parfois depuis longtemps (Lapeyre), cette globalité convergente de l’habitat dont la verticalité s'exprime enfin avec les constructeurs immobiliers qui prennent plus et mieux en considération leur rôle d'aménageurs, en affirmant ce termes complétif.             

 

Riche de sa diversité, noble de sa vocation à personnaliser les cadres de vie quotidiens, éphèmères ou passagers de chacun, l’agencement est la grande tendance de fond, de forme et d’avenir de l’habitat,qu'il soit domestique, résidentiel, collectif ou de bureau. Ce site en sera le média de réflexion, en étant à la fois son miroir et son vecteur d’idées. Le vôtre aussi, pour porter un autre regard.  

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