Le beau au prix du laid

Actualités - 09 nov. 2018

Le slogan était prôné par la fameuse enseigne Prisunic, avec la vocation de jouer un rôle capital en France dans l'accès au style moderne auprès de toutes les classes de la société. Une exposition permet de (re)découvrir ses mobiliers et autres supports emblématiques.

À la fin des années ‘60, l’aventure Prisunic, sous la direction artistique de Denise Fayolle puis de Jacques Lavaux, témoigne d’une inventivité et d’un avant-gardisme qui n’auront pas d’équivalent en France, voire en Europe. A partir d’une collection exceptionnelle de plus d’une centaine d’affiches et de dizaines de supports graphiques en 2 ou 3 dimensions (posters thermoformés) retrouvées avec passion depuis des années par le libraire Michael Seksik, et une sélection de mobilier emblématique prêtée pour l’occasion par XXO, Design Fair Paris propose de découvrir l’univers total, original et exigeant de Prisunic qui prônait « le beau au prix du laid » et a véritablement joué un rôle capital en France sur l’accès au style, moderne de surcroît, auprès de toutes les classes de la société. L’exposition aura lieu du 22 au 25 novembre à Espace Champerret dans le 17ème arrondissement de Paris.

Les conséquences de la crise 

Suite au krach boursier de 1929, le magasin Le Printemps décide de redynamiser ses ventes en créant un nouveau concept dont le slogan est alors « Vente spéciale à prix uniques ». En 1936, à l’époque des congés payés et d’un accès plus généralisé aux loisirs, l’enseigne choisit son nom définitif, ce sera Prisunic.

Alors qu’après-guerre, les Français se rendent en nombre aux Salons des Arts Ménagers (près d’1,5 million de visiteurs en 1962 !), que les femmes rêvent de toaster et de machine à laver tout en découvrant, dans les magazines, le « new look » de Dior... Prisunic va faire le pari d’offrir des objets quotidiens bien dessinés, au packaging soigné et épuré...déclinant une identité 100% contemporaine et totalement inédite qui s’appliquera aux produits en vente, mais aussi à la publicité, à la présentation des collections (les premiers défilés de mode en musique c’est Prisunic...) et jusqu’à l’aménagement des magasins.

Pour orchestrer cette révolution, Jacques Gueden alors directeur de Prisunic, nomme Denise Fayolle à la direction du style et de la publicité. Avec pour question fondatrice, « pourquoi populaire serait-il synonyme de moche ? », elle va, de 1953 à 1967, développer une esthétique de qualité, un style Prisunic pour que « l’aventure du beau pour tous » puisse commencer. Jacques Lavaux reprend le flambeau avec exactement le même esprit et les mêmes exigences. Dès les premières années, cette démarche novatrice rencontre une résonnance incroyable dans la société française et le succès est au rendez-vous.

Outre l’équipe permanente qui compte une quarantaine de personnes dont Andrée Putman, Denise Fayolle, rejointe par Maïmé Arnodin, fait appel à des photographes, des graphistes et des illustrateurs de renom : Roman Cieslewicz, Georges Lemine, Jean-Michel Folon ou encore Friedmann Hauss, graphiste et photographe dont l’affiche Eté 70 obtient le Prix des Lectrices du Journal Elle ; ou encore à Terence Conran pour le mobilier.Pour la première fois en France, Prisunic propose un univers global et cohérent pour l’ensemble du cadre de vie, « total look » alors totalement inédit.

L’exposition de l’Espace Champerret montrera la grande puissance graphique et créative de Prisunic pendant ces années, ainsi que, via l’influence de courants comme Le Pop Art, le Push Pin Studio (Michael Glaser, Tom Wiesselman...) mais aussi I. Noguchi sur ces productions, sa portée véritablement artistique qui va bien au-delà des sphères de la publicité et du marketing. Le mobilier Prisunic est celui qui a été choisi par Edmonde Charles-Roux et Gaston Deferre pour meubler, dans son intégralité, l’appartement qu’ils avaient sur le vieux port à Marseille à la fin des années 70.

J.B

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