Molitor, les courants d'arts entre les (5) étoiles

Actualités - 03 déc. 2019

 

Molitor, les courants d’arts entre les (5) étoiles

Piscine et lieu mythique de Paris au 20ème siècle, ce lieu a su sans cesse se réinventer en conservant son esprit populaire et artistique, jusque dans son hôtel de luxe et les 78 cabines de ses coursives. Visite guidée sans se mouiller.

 

Molitor : le lieu est mythique à Paris et son histoire est symbolique de résilience : elle commence en effet en 1929, l’année même marquant la fin des Années folles, fameuse période d’intense activité sociale, culturelle et artistique, débutée en 1920. Or, si “ La piscine Molitor Grands Etablissements Balnéaires d’Auteuil ” ouvre ses portes pour compléter l’immense centre sportif se mettant en place dans le 16ème arrondissement avec le Parc des Princes, les stades Jean Bouin et Roland Garros (c’est Johnny Weissmuller, quintuple médaillé Olympique et futur Tarzan des salles obscures, qui l’inaugure et qui officie en tant que maître-nageur durant cet été), le lieu s’affranchit rapidement de sa destination première pour devenir un lieu de rencontres et d’événements. Citons le gala des artistes en 1931, la Fête de l’Eau dès 1934, durant laquelle est élue la plus jolie baigneuse chaque été, sans compter les restaurants, bars et salon de coiffure qui entourent et animent cette piscine d’un genre insolite.

 

Lieu à la mode, la piscine Molitor traverse les modes et les décennies en conservant son charme et son attractivité remarquables. Rien n’est cependant éternel dans sa permanence et l’établissement entame son déclin en 1970 avec la fermeture définitive de la patinoire qui remplaçait le bassin extérieur en hiver. En 1989, à la date officielle d’expiration du bail, la direction de l’établissement remet les clefs des lieux à la mairie qui ferme ainsi ses portes pour une durée indéterminée. Mais un bâtiment abandonné à Paris ne l’est jamais totalement. Les graffitis apparaissent dans un premier temps sur les murs extérieurs de Molitor, puis sur les rambardes et les bassins vidés de leur eau. Après une dizaine d’années, les couleurs du street art redonnent vie au bâtiment délabré et certains artistes urbains - aujourd’hui reconnus du grand public - en font leur immense atelier à ciel ouvert. Le lieu devient également une scène pour des spectacles, soirées, défilés de mode organisés avec le concours de la Compagnie des Maîtres-Nageurs.

 

Molitor rouvre ses portes le 19 mai 2014. La mairie de Paris concède alors l’exploitation du bâtiment par le groupe AccorHotels et la société Colony Capital pour une durée de 54 ans. De fait, Molitor devient aussi un hôtel de 124 chambres et suites pensées par l’architecte Jean-Philippe Nuel (voir à la fin de cet article le lien vers sa tribune libre), à l’origine également de la re-décoration de l’Hôtel Dieu à Marseille, de l’hôtel Mélia à La Défense et des Cures Marines à Trouville. Toutes les chambres entourent le bassin d’été avec l’impression d’être à Molitor comme sur un paquebot. Le complexe comprend aussi un restaurant et un Spa by Clarins de 1 700 m² disposant, en plus de ses cabines de soins, d’un hammam, d’un sauna, d’une tisanerie et d’une salle de lecture. Le Club de Molitor qui propose en plus de ses installations sportives des cours collectifs et des animations culturelles toute l’année.

 

Enfin, chaque visiteur peut retrouver l’univers du street art qui fait partie intégrante de l’histoire de Molitor à travers les œuvres des 78 cabines de curiosités autour du bassin couvert, ou celles qui s’exposent sur les murs du lobby de l’hôtel, ou encore d’autres au détour d’un couloir. Les artistes ayant connu Molitor durant sa période d’abandon sont invités à revenir poser leur empreinte sur le nouveau bâtiment pour faire écho aux graffitis qui recouvraient les murs à cette époque.


J.A

Visuels : @Sébastien Giraud

 

Question à Sylvia Randazzo, directrice artistique :

Culture Agencement : Votre fonction est inédite dans le monde de l’hôtellerie. En quoi consiste-t-elle ?     

Sylvia Randazzo : « Lorsque j’ai rejoint Molitor en 2015, j’ai pris la succession d’une directrice artistique qui était déjà présente, car il y a toujours eu dans cet établissement la volonté de promouvoir la création artistique, d’insuffler un courant d’art comme disait Laurent Jaïs. S’il n’est pas question de modifier l’architecture d’intérieur et le mobilier mis en œuvre par Jean-Philippe Nuel, nous pouvons toutefois instaurer une ambiance particulière au travers de productions d’art urbain - street art en anglais - sur les murs des espaces collectifs tels que le lobby de l’hôtel, la Brasserie Urbaine, dans les cabines du bassin d’hiver. A ces productions s’ajoutent des évènements réguliers tels que vernissages, expositions, installations et ateliers. Mon domaine d’intervention est de faire découvrir ces univers aux clients de l’établissement, mais aussi aux personnes venant simplement s’y restaurer ou profiter de notre magnifique piscine d’hiver dont les coursives sont jalonnées de 78 cabines transformées en autant d’espaces d’expressions pour les graffeurs, constituant une galerie d’art unique, la plus grande au monde de ce genre. Nous souhaitons ainsi proposer une expérience totale, que l’on réside à Molitor plusieurs jours ou quelques heures. Cette démarche ouverte à tous s’inscrit dans l’héritage séculaire de notre établissement et elle vise à rendre son image plus grand public. L’art est un bon médium pour s’ouvrir au monde. »

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