Telle pourrait être définie la vocation de l’Ecole Camondo, lieu parisien de référence de l’enseignement de l’architecture d’intérieur, et composante de l’institution culturelle Les Arts Décoratifs. Parcours des lieux et de sa vocation avec pour guide son directeur, René-Jacques Mayer.
Culture Agencement : On pourrait dire de l’école Camondo qu’elle est à l’architecture d’intérieur ce que l’école Boulle est au mobilier. Que pensez-vous de cette comparaison et pouvez-vous rappeler quels sont les cursus, enseignements et vocation de votre établissement ?
René-Jacques Mayer : « La comparaison est très flatteuse, tant l’école Boulle est un établissement d’enseignement supérieur de très grande qualité. Tout comme Boulle, l’école Camondo est historique et reconnue dans le paysage de l’architecture intérieure et du design d’espace. Elle forme en 5 ans les concepteurs des espaces d’aujourd’hui et de demain, qu’ils soient privés ou publics. Son approcha volontairement transversale entre architecture intérieure et design lui confère une place singulière dans le paysage de l’enseignement supérieur où nombre d’écoles affirment une forme de spécialisation. L’approche sensible, esthétique et plastique est aussi une identité forte de l’école pour que les étudiants que nous formons développent leur propre écriture de conception et de représentation. A Camondo, ils articulent et conçoivent leurs projets dans une approcha complète allant de l’espace à l’objet, et inversement.
Culture Agencement : On l’ignore souvent, mais le design tient une place importante dans l’enseignement de votre école, Philipe Starck étant d’ailleurs son plus célèbre ancien élève. Quel rapport donnez-vous entre les objets finis, vecteur d’une expérience de l’instant d’usage, et l’architecture d’intérieur, discipline des flux optimisés, vectrice d’une expérience durable de vie ?
René-Jacques Mayer : Dans la pédagogie de l’école, ce rapport est permanent. Elle place la question de l’usage, et donc de l’usager, au cœur de son enseignement. Les objets, au sens large, physique ou immatériels, occupent l’espace et contribuent à son ambiance, sa fonctionnalité, son sens. Qu’il s’agisse de mobilier, de couleur, de lumière, de design sonore, ils composent l’espace, au-delà des flux, des circulations, à la manière dont les utilisaient les ensembliers. Ils sont aussi les éléments fondateurs des expériences que l’on attend de nos lieux de vie, personnels, professionnels, ou de loisirs.
Culture Agencement : Fondée en 1944, l’école Camondo a été soucieuse de rester en phase avec son époque. Quelles ont été les grandes évolutions de ses enseignements au cours des décennies et particulièrement depuis ces dix dernières années ?
René-Jacques Mayer : Ecole de taille humaine, Camondo a toujours été libre et innovante dans sa pédagogie. Elle a introduit il y a plus de 30 ans le design, dans sa dimension contextualisée à l’espace. Plus récemment, l’ouverture au sens, au monde, marque sa pédagogie avec la production d’un mémoire de recherche en diplôme, l’introduction de la sociologie, de la sémiotique. Depuis l’année dernière, 18 nouveaux enseignements ont été crées, en format optionnel, sur 3 territoires : les nouveaux ensembliers (haute décoration, savoir-faire, sur mesure…) la scénographie (arts de la scène, muséographie, expérience retail, design d’interaction..) et enfin Espaces pour demain, pour mieux appréhender les grandes évolutions sociétales de nos usages du quotidien et de notre cycle de vie (apprendre, travailler, habiter, la mobilité, la nouvelle société des loisirs,…) La nouvelle maquette pédagogique vise à renforcer le parcours de l’étudiant, dans ses choix et ses territoires d’intérêt.
Culture Agencement : Enfin, comment voyez-vous l’avenir de l’architecture d’intérieur et de la façon de l’enseigner ?
René-Jacques Mayer : L’architecture intérieure a pour moi le vent en poupe. Elle s’est aujourd’hui affranchie de son rapport complexé à l’architecture. Beaucoup de projets architecturaux se définissent de l’intérieur, des usages. Les résultats de réinventer Paris en sont une belle illustration. Elle a aussi le vent en poupe, car le champ d’intervention est vaste et sans cesse renouvelé : commerce, hôtellerie, restauration, habitat privatif, espaces publics, scénographie,… tant au plan national qu’à l’échelle internationale. Les indicateurs d’insertion professionnelle en sont la preuve : 90 % de nos étudiants travaillent dans leur champ de formation (détail capital) 6 mois après leur diplôme. C’est un bel appel d’air pour des vocations naissantes. »
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